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PTPs-VAC et Elikya : l’innovation thérapeutique dans le domaine de l'immuno-oncologie

Innovation Article publié le 12 mai 2022 , mis à jour le 12 mai 2022

Grâce à la découverte d’une technologie inédite, la future start-up issue du projet PTPs-VAC développe un vaccin peptidique anti-cancéreux. De son côté, la start-up Elikya Therapeutics met au point de nouveaux médicaments dans le domaine de l'immuno-oncologie.

Le projet PTPs-VAC (Produits de traduction précoces - vaccination) vise à identifier des peptides antigéniques afin de concevoir un vaccin peptidique anti-cancéreux. Son porteur est Sébastien Apcher, chercheur au sein de l'unité Immunologie des tumeurs et immunothérapie contre le cancer (ITIC- Univ. Paris-Saclay, Gustave Roussy, Inserm). Soutenu par la SATT depuis 2018, il identifie des néo-épitopes, ou néo-antigènes. Ce sont des peptides contenant entre huit et quinze acides aminés et qui induisent une réponse immunitaire. Les tumeurs n’en développant pas suffisamment de manière naturelle, il s’agit de les inciter à en produire. De cette manière, le système immunitaire les reconnaît comme éléments étrangers à éliminer.

 

Le splicéosome, une cible thérapeutique clé

La technique utilisée pour stimuler la production de ces peptides est basée sur les travaux effectués en en 2014 par Sébastien Apcher et son équipe. Ils découvrent que le splicéosome, un complexe protéique présent dans le noyau de toutes les cellules nucléés, est essentiel à l’épissage des ARN. C’est-à-dire au mécanisme de maturation de l’ARN qui lui permet de se débarrasser de séquences non codantes (les introns) pour produire un ARN messager traduisant des protéines fonctionnelles. « Nous avons montré qu’en inhibant le splicéosome, il est possible de conserver les ARN immatures plus longuement dans la cellule et donc de favoriser la production de néo-épitopes à partir de ces ARNs », commente Sébastien Apcher.

 

Une rencontre décisive

En 2016, dans le cadre de son projet, Sébastien Apcher, qui souhaite tester une molécule inhibitrice du splicéosome sur des modèles murins, contacte Mouad Alami aujourd’hui directeur du laboratoire Biomolécules : conception, isolement, synthèse (BioCIS –- Univ. Paris-Saclay, CNRS, Univ. Cergy-Pontoise). Ce dernier est spécialisé, entre autres, en conception et découverte de molécules bioactives, qu'elles soient issues de synthèses ou de l'extraction de produits naturels. Mouad Alami est le seul à pouvoir modifier la molécule pour qu’elle présente des propriétés physico-chimiques et pharmacologiques dépourvues de toxicité et compatibles avec une étude in vivo. 

 

Un dépôt de brevet pour la technologie d’identification de peptides antigéniques

En 2017, Sebastien Apcher, avec l’aide de la SATT Paris Saclay, décide d’identifier toutes les séquences peptidiques non codantes des cellules cancéreuses de sarcome et de mélanome, avec l’objectif de produire un vaccin de peptides non codants. Pour y parvenir, le chercheur et son équipe réalisent un séquençage des cellules tumorales afin d’identifier tous ses ARNs pouvant potentiellement être traduits en peptides, et d’alimenter une base de données de peptides immunogéniques. En parallèle, ils éluent les peptides présents à la surface cellulaire de la tumeur. Puis, ils rapprochent ces derniers de la base de données afin d’identifier et de sélectionner les peptides immunogéniques qui constituent la base du vaccin peptidique. « Par exemple, nous avons fait un séquençage de l’ARN dans toutes les cellules du sarcome MCA205 de souris, et nous avons ainsi produit une base de données d’environ deux milliards de peptides potentiellement produits par les cellules tumorales », précise Sébastien Apcher. Il dépose en 2019 un brevet avec Gustave Roussy pour cette technologie d’identification de peptides pouvant produire des réponses immunitaires spécifiques contre certains cancers.

 

La création prochaine d’une start-up

Fort de ces travaux, Sébastien Apcher les transfère aujourd’hui à l’humain en réalisant des tests sur des biopsies de cancer du côlon. Le but est d’injecter aux futures patientes et patients des peptides spécifiques non codants, afin de stimuler leur système immunitaire pour qu’il détruise les cellules cancéreuses. Le chercheur est en train de développer la même stratégie pour d’autres cancers tels que celui du sein, et souhaite déterminer si certains peptides antigéniques sont communs à plusieurs cancers ou s’ils sont spécifiques à chaque typologie. « Nous allons créer une start-up très prochainement pour poursuivre ces travaux et transformer le projet PTPs-VAC en vaccin, c’est-à-dire pour, entre autres, le faire certifier », résume Sébastien Apcher.

 

Une autre start-up: Elikya Therapeutics

La collaboration entre les deux chercheurs donne naissance à une autre aventure entrepreneuriale dans le domaine de l’innovation thérapeutique. Il s’agit d’Elikya Therapeutics, créée en décembre 2021. Elle est implantée à Strasbourg chez l’incubateur Semia. La start-up développe des petites molécules dans le cadre de nouvelles thérapies contre le cancer, grâce à des candidats médicaments de nouvelle génération. Les travaux reposent sur deux types de technologie. Le premier reprend les travaux de Sébastien Apcher sur l’identification de peptides immunogéniques afin de stimuler le système immunitaire. Le second vise à développer des petites molécules à activité multicibles. C'est-à-dire ayant la capacité supplémentaire d’interagir avec un des mécanismes de développement des tumeurs, qu’il soit prolifératif ou épigénétique. « Il n’existe encore aucune solution sur le marché qui combine ces deux approches, nous pensons que cela confère à ces petites molécules des propriétés inédites et très prometteuses », souligne Mouad Alami. Leur activité étant hautement cytotoxiques, ces petites molécules sont utilisées dans une stratégie immuno-conjuguée ou ADC (antibody-drug-conjugate).

 

Une ambition nommée « espoir »

Les deux chercheurs ont aujourd’hui des preuves de concept préclinique chez l’animal dans plusieurs modèles de tumeurs, à savoir le sarcome, le mélanome et le cancer du poumon. Afin de transférer cette technologie à l’humain, ils doivent désormais affiner leur compréhension des mécanismes de fonctionnement de ces petites molécules, et sont à la recherche d’investisseurs pour y parvenir. 

L’ambition d’Elikya Therapeutics est véhiculée par son nom, qui signifie « espoir » en Lingala, la langue maternelle de l’épouse de Sébastien Apcher, née en république démocratique du Congo. Car les deux chercheurs sont portés par l’espoir de sauver des vies grâce au renouvellement de l’offre thérapeutique dans le domaine de l'immuno-oncologie.